jeudi 6 octobre 2011

PHASE 3, L'INSTALLATION

La phase 1 fut les vacances, la phase 2 la rentrée,  nous sommes arrivés, 2 mois et demi après, à la phase 3 L'INSTALLATION : dans les dictionnaires, ce mot a une connotation très matérielle liée à l'aménagement, la mise en place d'une maison, d'un campement militaire, d'une stratégie, nul part je n'ai lu une définition à connotation humaine évoquant la dimension psychologique de l'installation. Ce sentiment très intime qui consiste à prendre pleinement conscience que la nouvelle routine est en train de régler notre quotidien. Voilà, notre vie cette année devrait ressembler à ça : ce que je vis aujourd'hui sera pareil à la semaine prochaine....à quelques détails près...(Nous partons aujourd'hui à New York, nous n'y retournerons probablement pas avant l'année prochaine)..... Mais les enfants ont trouvé leur cercle de copains, leurs repères, Guy les clés de son bureau, moi les joies du service après-vente.
L'installation c'est : je commence à comprendre pourquoi, .... comment,  ....  comment fonctionne l'humour des adolescents de mon âge, se dire que je serai la française du groupe et qu'il faudra que je fasse avec ; à chaque fois que j'émets un avis :"oh, c'est trop cute (mignonne), ça se voit que tu es française.....", et pourtant se surprendre à penser québécois "oh my god...!"qu'elle m'énerve....
L'installation c'est se surprendre à prendre-l'habitude-de regarder tous les matins le thermomètre dehors et assister lentement à l'installation de l'hiver : pour l'instant,  le thermomètre est le seul indice de changement de saison, parce que si l'on devait se fier au reste, les arbres ont toujours leurs feuilles vertes, (bien que les couleurs arborent petit à petit la teinte orange), le ciel est toujours bleu, les filles portent encore des jupes, les terrasses de café sont encore pleines, on ne met pas encore le manteau.
L'installation, c'est prendre conscience que cette maison sera le théâtre de notre vie durant une année :  notre odeur prend place dans les chambres, les odeurs de cuisine imprègnent les murs, les scènes de joie, de peine, de déception, d'engouement  se tiendront dans les pièces de cette maison. Ce n'est pas une maison de vacances. La fugacité n'existe pas. L'instant est inscrit dans une certaine pérennité qui n'est pas frivole (définition : qui a peu d'importance, dont le caractère insignifiant ou vain ne mérite pas qu'on s'y arrête) ; des décisions y seront prises qui auront une incidence sur le cours de la vie : je pense aux ados qui attacheront leurs souvenirs de vie québécoise à cette maison, peut-être y ramèneront-ils leurs enfants plus tard et leur diront : "c'est ici que....j'ai pris la décision de venir faire mes études à Mc Gill (propos de Victor)"
L'installation c'est aussi s'approprier les endroits de la maison pour lire, regarder un film, faire les devoirs, réfléchir ou repasser le linge, (ou faire les 2 en même temps), jouer du saxophone, recevoir les amis; C'est découvrir le changement de la lumière dans les pièces, la répartition de la chaleur qui implique le sens du vagabondage dans la maison.
L'installation  c'est avoir le sentiment de revenir à la maison, chez soi, après 4 jours d'absence, sans cette froide impression d'avoir à  reprendre possession des lieux, puisque nous les avons déjà assimilés, intégrés  tel étant notre cadre de vie personnel habituel. Personnel. Voilà le mot. C'est devenu intimement personnel. Un attachement s'est opéré.
L'installation c'est le sentiment de ne pas faire seulement un stage lorsqu'on prend des cours de saxophone ou des cours de peinture, mais d'apprendre et prendre une petite partie de la culture de ce pays, à la manière de ce pays, décomplexée et débridée.
L'installation, c'est se demander comment je vais faire pour me réhabituer à mon ancienne vie ? La réponse est vite trouvée : grâce aux amis et à la famille !

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